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N° 751 - Le vol du Flateyjarbók [KORI] par Rico

L’activité était à son comble dans les bureaux de la police. Toute la plus fine équipe de la police islandaise s’affairait, courait, s’échangeait des papiers, recoupait des éléments.

Même le premier ministre du pays se trouvait là, à poser sans cesse des questions pour en rendre compte au téléphone au président, à la presse ou à on ne savait qui.

Kori avait été mandé aussitôt la nouvelle connue : l’institut Arni Magnusson avait été cambriolé. C’était toute une part du pays qui disparaissait avec de nombreux ouvrages anciens, Flateyjarbók en tête, ce qui causait l’émoi de tout le pays…

Le chef de police, de son bureau, semblait coordonner à grand peine ses hommes : poussant des cris au téléphone ou par la porte, faisant venir ses éléments ou allant leur parler, il avait le visage rougeaud de celui qui ne s’en sort pas et préférerait être ailleurs…

Le cambriolage avait été exécuté avec une précision méticuleuse. Les spécialistes du laboratoire estimaient que tout avait été calculé pour aller au plus vite et qu’il n’avait pas fallu plus de trente minutes, probablement moins, pour entrer et tout cambrioler.

Depuis la découverte du cambriolage, tôt le matin, le chef de police n’arrêtait pas. Après avoir mis au courant les plus hautes instances, il avait eu carte blanche pour utiliser toutes les forces de l’ordre qu’il souhaitait.

Mais si on avait pu déterminer comment étaient entrés les cambrioleurs - et comment ils étaient partis -, c’était à peu près tout et le pauvre chef de la police s’escrimait en vain dans des pistes peu convaincantes…

Kori regardait toute cette animation, assis discrètement sur une chaise, dans un coin. Il attendait le coup de fil.

Il se trouvait justement à Reykjavík pour une conférence qu’il devait donner et quand il avait entendu la nouvelle aux informations, il avait immédiatement compris qu’il s’agissait d’un forfait perpétré par Kereb, le misérable cambrioleur des plus beaux trésors existants.

De par sa notoriété et le côté archéologique du cambriolage, Kori avait réussi à passer - non sans difficulté - le cordon protecteur du poste de police pour expliquer son ressenti : seul Kereb pouvait vouloir cambrioler des ouvrages anciens avec cette habileté.

On avait accepté que Kori reste car il avait également raconté son passé tumultueux avec Kereb et le fait que celui-ci, particulièrement imbu de lui-même, ne pouvait s’empêcher de laisser une trace de son passage. Comme il n’y avait absolument rien à l’Institut, Kori était persuadé que Kereb appellerait. Et il attendait cet appel qui, sans aucun doute, donnerait une indication sur l’endroit où se trouvait ce misérable – il se sentait tellement supérieur qu’il ne pouvait en être autrement...

L’appel eut lieu précisément à midi.

On fit aussitôt venir Kori à l’appareil, lequel avait été mis sur haut-parleur. Mais le message, énoncé par une voix déformée, n’avait guère d’intérêt. Le style était tout à fait celui de Kereb, prétentieux et méprisant, mais ce n’était que pour assurer qu’il était l’auteur de ce « merveilleux forfait » et qu’il aurait un grand plaisir à compulser les ouvrages…

On se tourna vers Kori aussitôt le message dispensé, quand Kereb eut raccroché, mais il n’y avait rien à dire. Rien à déchiffrer.

Un homme du service s’immisça dans le groupe formé des personnes les plus importantes que comptaient Reykjavík et l’Islande dans cette affaire. L’homme ne s’adressa qu’à son supérieur :

- On a tenté de remonter l’appel, mais c’est impossible : il ne cesse de passer par des relais.

Kori, plein d’assurance, coupa la parole au chef de la police et au premier ministre qui cherchaient à parler en même temps.

- Quels sont ces relais ?

L’homme regarda son supérieur. Celui-ci lui faisant un signe d’approbation, il daigna répondre.

- On a retracé l’appel en passant par Honolulu, Osaka puis les îles Gambier. Ensuite, il y a Apia, Astana, Tucson… Et on termine par Vientiane et Perth avant qu’il ait raccroché…

Le visage de Kori s’illumina d’un sourire.

- Je le savais bien… Ce n’est pas pour rien que la conversation a duré ce temps précisément. Il savait jusqu’où vous remonteriez… Messieurs, si je ne peux pas dire l’endroit exact, je peux déjà vous dire dans quelle ville il se trouve…